Travaux financés loi Alur : quelles possibilités ?

Chaque année, des millions d’euros dorment sur les comptes des copropriétés françaises, bloqués par la régulation stricte de la loi ALUR. Depuis 2014, impossible pour les immeubles de plus de dix lots d’y couper : la création d’un fonds de travaux s’impose, prélevé à hauteur d’au moins 5 % du budget prévisionnel. Pas d’exception possible pour les bâtiments concernés, le texte verrouille toute dérogation.

Mais disposer de cette enveloppe ne fait pas tout. La loi encadre au cordeau son usage : chaque euro doit être fléché selon des critères précis, et un vote en assemblée générale reste incontournable pour débloquer les fonds. Impossible de venir éponger un déficit de trésorerie ou de financer le moindre chantier : le règlement est strict, parfois ignoré ou mal compris des copropriétaires, qui se retrouvent face à un mode d’emploi rigide.

Loi Alur : ce que chaque copropriétaire doit savoir

Depuis 2014, la loi Alur rebat les cartes pour la gestion des copropriétés. Tout copropriétaire doit désormais composer avec des obligations nouvelles : mise en place du fonds de travaux, diagnostic technique global, et, plus récemment, plan pluriannuel de travaux sous l’impulsion de la loi Climat et Résilience. Des réformes qui bousculent les habitudes, forçant le syndicat des copropriétaires à revoir ses pratiques et sa gouvernance.

Le fonds de travaux s’impose comme la pièce maîtresse des nouvelles règles : il anticipe les chantiers à venir, sécurise la pérennité de l’immeuble et protège la valeur du patrimoine collectif. Le seuil fixé à 5 % du budget prévisionnel est collecté par le syndic de copropriété, puis affecté à chaque lot. Ce montant n’est pas mutualisé, il suit le lot même en cas de vente du bien. Peu de copropriétaires le savent, mais cette règle peut peser lors d’une transaction immobilière.

Le règlement de copropriété mérite donc une relecture attentive. Beaucoup de clauses adoptées avant la loi Alur ou la loi Elan ne sont plus applicables : les syndics doivent se tenir à jour, actualiser la fiche synthétique de l’immeuble et vérifier la conformité des décisions votées en assemblée générale.

Voici les points à retenir pour quiconque vit en copropriété :

  • Le fonds de travaux est obligatoire dès que l’immeuble dépasse dix lots.
  • Les sommes collectées restent attachées au lot et ne peuvent pas être récupérées par le vendeur.
  • Le dispositif doit s’articuler avec les exigences du plan pluriannuel de travaux.

Ce virage vers plus de prévoyance et de transparence exige de chaque copropriétaire qu’il s’approprie ses droits et devoirs. Maîtriser ces règles, c’est mieux piloter la rénovation et la valorisation de son bien, et éviter de mauvaises surprises lors des assemblées générales ou d’une vente.

Quels travaux peuvent réellement être financés par le fonds de la loi Alur ?

Les possibilités offertes par le fonds de travaux créé par la loi Alur se concentrent sur des interventions ciblées. L’objectif est clair : préserver l’immeuble dans la durée. Impossible d’utiliser ce fonds pour tout et n’importe quoi : seules certaines catégories de travaux sont concernées, en priorité ceux qui relèvent de la conservation ou de l’entretien lourd, et toutes les mises à niveau imposées par la réglementation, que ce soit dans le cadre du plan pluriannuel de travaux ou à la suite d’un diagnostic technique global.

Les copropriétaires peuvent ainsi mobiliser le fonds pour des opérations majeures : ravalement de façade, réfection de toiture, rénovation des parties communes, ou mise aux normes des installations électriques. La rénovation énergétique n’est pas oubliée : isolation, changement de chaudière collective, remplacement des fenêtres ou des portes d’entrée peuvent entrer dans le périmètre. À l’inverse, les frais courants comme le ménage ou l’entretien annuel de l’ascenseur restent à la charge du budget prévisionnel classique.

En pratique, les types de travaux éligibles sont les suivants :

  • Opérations de conservation : gros œuvre, structure, étanchéité.
  • Projets de rénovation énergétique : isolation, équipements collectifs.
  • Mises en conformité exigées par la loi : sécurité, accessibilité.

Le syndic de copropriété soumet en assemblée générale la liste des travaux à inscrire au plan pluriannuel. Seuls ceux qui sont approuvés par le vote des copropriétaires peuvent profiter du fonds. Ce mécanisme donne aux copropriétés une structure pour organiser leurs investissements lourds, tout en respectant l’esprit de la loi Alur : anticiper plutôt que subir les urgences.

Modalités de gestion : fonctionnement du fonds de travaux en pratique

Le fonds de travaux, tel que la loi Alur l’a instauré, s’applique à la majorité des copropriétés. Depuis 2017, chaque immeuble concerné doit verser une cotisation annuelle spécifique, calculée sur la base du budget prévisionnel (généralement 5 %). Cette somme s’ajoute aux charges habituelles, mais elle n’est jamais mélangée aux autres postes de dépenses : elle reste isolée et dédiée à son objectif.

La gestion du fonds incombe au syndic de copropriété, qui doit ouvrir un compte bancaire séparé pour y déposer les versements. Transparence oblige : chaque copropriétaire peut consulter, via la fiche synthétique, le montant exact disponible et la liste des travaux financés. Il n’est pas question d’utiliser ces fonds pour des charges d’entretien courantes ni pour des urgences hors du plan pluriannuel.

L’assemblée générale conserve la main : elle valide chaque projet et décide de la mobilisation des fonds à la majorité. Le syndic procède ensuite au déblocage des sommes pour les travaux votés, en respectant scrupuleusement les règles posées par la loi. Un usage dérogatoire n’est envisageable qu’en cas de situation exceptionnelle, et seulement si l’assemblée le décide explicitement.

À travers ce dispositif, la copropriété s’engage dans une gestion plus structurée : anticipation, transparence, et, parfois, débats animés entre copropriétaires lors des votes. L’arrivée de la loi Climat et Résilience renforce encore cette discipline collective, chaque lot participant à l’effort commun pour préserver et valoriser l’immeuble.

Entrepreneur en construction parlant avec un couple sur un balcon rénové

Questions fréquentes et points de vigilance pour bien utiliser le dispositif

Les interrogations sont nombreuses dès qu’il s’agit d’activer le fonds de travaux. Seules les interventions prévues par le plan pluriannuel de travaux ou imposées par le diagnostic technique global peuvent y prétendre. Un ravalement ou une réparation d’ascenseur décidés dans l’urgence, sans inscription au plan, ne sont pas finançables par ce biais.

Dans les conseils syndicaux, plusieurs points méritent une attention particulière :

  • Le taux de cotisation ne peut jamais descendre sous le seuil légal de 5 % du budget prévisionnel, sauf si le plan pluriannuel démontre un besoin inférieur.
  • Le fonds reste attaché au lot de copropriété. Lorsqu’un bien est vendu, le vendeur ne récupère pas sa quote-part : cette somme suit le bien, pas son propriétaire. Ce détail n’est jamais anecdotique lors d’une vente.
  • La fiche synthétique remise par le syndic indique précisément la situation du fonds : montants disponibles, affectations, historique d’utilisation.

Le syndicat des copropriétaires doit veiller au respect strict de ces règles. La loi Alur, épaulée par la loi Climat et Résilience, ne laisse que peu de latitude à l’interprétation. Un suivi rigoureux s’impose, de la constitution du fonds à sa mobilisation, en passant par la traçabilité des dépenses. Ce dispositif, pensé pour garantir la solidité du patrimoine collectif, exige implication et vigilance à chaque étape : la moindre faille dans son application peut coûter cher à tous les copropriétaires.